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Chaque histoire est inspirée de témoignages, les personnages sont fictifs.

Christine, 43 ans, secrétaire dans un centre médico-psychologique

11h23, mon ventre gargouille mais je m’empresse de taper un courrier pour l’envoyer au plus vite à une famille. Le téléphone n’arrête pas de sonner. Les familles sont désemparées face à l’attente qu’il y a entre l’inscription de leur enfant et les premiers rendez-vous. Je passe alors du temps à leur expliquer que, malheureusement, il y a des délais d’attente et que nous faisons notre maximum mais manquons de moyens humains. Nous sommes en octobre et la directrice vient dans mon bureau pour me donner le montant restant du budget annuel accordé au matériel pour les professionnels de santé. Chaque professionnel est passé me voir avec sa liste et le prix de chaque article. Monte alors une boule, lourde, jusque dans ma gorge. Ces grands nombres m’angoissent. Pourtant, je dois surmonter ma peur et faire mon travail. Je dois calculer s’il reste assez de budget pour commander les articles de tous mes collègues. Les grands nombres sont une bonne excuse pour me permettre d’utiliser la calculatrice sans avoir honte. Mais si seulement il ne s’agissait que des opérations… Non, je suis surtout freinée par la méthode à utiliser pour résoudre ce problème. Qu’est-ce que je dois calculer en premier ? Que faire ensuite avec ces nombres ? Comment suis-je sure de mon résultat ? Que dois-je taper sur la calculatrice ? Je commence à effectuer quelques opérations, j’efface, je recommence et me décourage. Je retente, me demande si ce résultat est cohérent et vérifie avec la calculatrice. Enfin, je me résigne et vais solliciter ma collègue. Tous les jours, je tente de dissimuler mes difficultés pour ne pas paraître incompétente mais je suis toujours ramené à mes limites. Comment les accepter ? Comment accepter que je ne peux pas manipuler les nombres comme tout le monde ?

   

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